Le management des 3%

Qui a travaillé dans une entreprise d’une certaine taille a forcément été confronté, peut-être sans le savoir, au management des 3%. Mais qu’est-ce que c’est que cette chose là ? Et accessoirement que vient-elle faire en chambre d’hôte ?

Le management des 3% c’est cette pratique managériale qui consiste à tenter de réguler un comportement déviant mis en œuvre par une minorité de personnes (estimée à 3%) en imposant une contrainte visant à supprimer cette déviance à l’ensemble du personnel. S’il est, par exemple, arrivé une année qu’une personne ait piqué à outrance dans la réserve de crayons au bureau pour remplir la trousse de son gamin à la rentrée, alors un manager adepte du management des 3% décidera de mettre sous clé toutes les fournitures de bureau et de ne les rendre accessibles qu’après demande écrite et motivée à son supérieur hiérarchique. Si la pratique déviante passera, sur un coup de chance, de 3% à 2%, il est certain que la réplique pénalisera surtout le travail des 97% restant !

Bien sur si on revient à l’Aupenade on ne parlera plus des comportements des salariés mais de ceux des clients et il ne s’agira pas vraiment de déviances mais de petits trucs qui ont fini par nous agacer. Et s’il y a bien une chose que nous gardons en tête, c’est de ne pas tomber dans le piège grand ouvert du management des 3% ! A la place de cela, Marie-Hélène a une méthode magique chaque fois qu’elle détecte un comportement auquel elle voudrait mettre fin : « il faut mettre un écriteau ! ».

  • Les clients ne sonnent pas avant d’entrer dans la partie privée du Domaine ? « Il faut mettre un écriteau ».
  • Certains gloutons avalent plus que le croissant qui leur est dévolu au petit-déjeuner ? « Il faut mettre un écriteau ».
  • Nos hôtes oublient de passer régler leur taxe de séjour ? « Il faut mettre un écriteau ».
  • Les gens garent leur voiture sur la pelouse plutôt que sur le parking prévu à cet effet ? « Il faut mettre un écriteau ».
  • Les étourdis partent avec la clé de leur chambre dans la poche ? « il faut mettre un écriteau ».
  • Les plus pressés arrivent bien avant l’heure de mise à disposition des chambres ? « Il faut mettre un écriteau ».
  • Les petits malins oublient de nous signaler les consommations prélevées dans le frigo en libre service ? « Il faut faire un écriteau ».
  • Les clients du gîte jettent leurs déchets verts n’importe où plutôt que dans le tas de composte ? « Il faut mettre un écriteau ».

Ce n’est pas compliqué, si on s’écoutait, l’Aupenade serait un « livre dont vous êtes le héros » grandeur nature où il suffirait de passer d’écriteau en écriteau pour dérouler un séjour « dans les normes » ! Alors bien sur, on ne cède pas aux sirènes de l’écriteau à chaque fois… mais sur quelques sujets il faut bien avouer que l’on s’est un peu acharné ! Démonstration :

Dans un métier où nous vivons littéralement avec nos clients, il est important que nous préservions une zone de tranquillité et d’intimité, un peu comme la « salle CSA » dans les émissions de téléréalité ou le « pouce » des jeux d’enfants qui garantit un espace de répit et de repli. Notre zone de répit c’est la partie privée de notre maison, les enfants peuvent y déambuler librement, on peut s’y balader en slip si on veut, on peut parler fort ou flatuler même ! Bref tout ce que l’on ne peut pas faire dans le reste du domaine qui est un immense espace de réception des clients. Alors la maison c’est sacré, on n’y entre pas comme ça sans sonner (histoire de nous laisser le temps d’enfiler quelque chose sur le slip !). Lorsque nous sommes arrivés, juste au dessus du bouton de sonnette, il y avait écrit un petit « sonnez » au feutre, à demi effacé. Nous l’avons très vite remplacé par un petit écriteau officiel acheté en grande surface, avec « sonnez » accompagné du pictogramme approprié : doigt qui appuie sur un bouton. Ça n’a pas changé grand chose, une partie des clients continuait à entrer dans notre maison sans sonner. On s’est dit que l’écriteau -sur le côté de la porte- était mal positionné et trop petit. On a donc ajouté  un très grand écriteau en ardoise de 80 cm de large portant la mention « accueil » puis l’horaire de mise a disposition des chambres (pour régler un autre problème 🙂 ) et enfin un grand « sonnez ». Déjà à plusieurs mètres de la porte on peut lire la consigne. Si le nombre d’intrusion a diminué ce n’est que de façon presque imperceptible ! Alors on a ajouté un troisième écriteau (en forme de cœur par ce qu’on est des gens sympas !) qui porte la mention « sonnez, nous arrivons pour vous ouvrir », histoire que les gens comprennent que non seulement ils doivent sonner mais qu’en plus ils doivent aussi attendre que nous venions leur ouvrir la porte, le seul coup de sonnette ne valant pas permis d’intrusion ! L’écriteau a été placé sur la porte elle même à hauteur d’yeux d’un adulte. Impossible donc d’ouvrir la dite-porte sans avoir les yeux sur cet écriteau ! Et pourtant il arrive encore régulièrement nous voyions une tête passer par la porte de la cuisine -il faut traverser presque tout le rez-de chaussé pour arriver là- qui nous dit « ha,vous êtes là, je ne trouvais personne » « désolé nous n’avons pas entendu la sonnette » « ba c’est normal je n’ai pas vu qu’il y avait une sonnette ! ». Pour le matin il y a une petite variante « je suis entré sans sonner je ne voulais pas vous réveiller ! » : au cas où nous aurions mis en place le petit déjeuner en plein somnambulisme ! Les gens sont prévenants tout de même…

L’étape d’après on la connaît  : il faudrait en permanence fermer notre porte d’entrée à clé pour réguler ces 3% de clients envahissants, en pourrissant au passage la vie des 6 habitants de la maison ! Mais ça on ne veut pas s’y résoudre…Alors on réserve la ballade en slip au premier étage, là au moins personne n’a encore jamais osé s’y aventurer sans notre permission… enfin pour le moment !

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